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Les estaminets et les jeux

Les bourleux

   

La bourle est un plateau rond, épais de 10 centimètres environ, d'un diamètre de 20 centimètres et d'un poids de 1 kilo 800 à 2 kilos.
Il y a 100 ans, la bourle était tournée dans un bois très spécial: le gaiàc poussant aux Antilles et en Amazonie, appelé aussi "bois de fer". Ce bois éclatait, malheureusement très vite à la sécheresse et les bourleux devaient entretenir leurs bourles en les trempant dans l'huile ou dans le pétrole, et les frotter régulièrement, avant de jouer, avec un morceau de chiffon de laine. Maintenant, les bourles sont en noyer. Mais il n'y a presque plus de tourneur de bourle, il devient de plus en plus difficile de s'en procurer.
Si vous posez une bourle sur sa tranche (un peu convexe), vous constaterez qu'elle penche légèrement d'un côté: c'est son côté fort. Sous une petite plaque de cuivre, qui semble là seulement pour décorer, se trouve une cavité garnie de plomb.

Pour jouer à la bourle, il faut bien sûr une bourloire. L'aire de jeu des bourleux est délicate à préparer : il faut un terrain de 2 mètres 50 à 3 mètres de largeur sur 22 à 25 mètres de longueur. On y enlève d'abord, sur toute la surface, une couche de terre de 50 centimètres de profondeur. On remplace celle-ci par un mélange d'argile et de farine de seigle. On arrose le tout avec de l'urine de vache. Comme la bourloire doit être incurvée, on lui donne cette forme à l'aide d'un gabarit en bois. Puis, on la tasse au rouleau de jardinier, sans y mettre les pieds pour éviter de la déformer. Quand la terre est bien sèche, on l'arrose de nouveau avec de l'urine de vache, afin de tuer les vers qui pourraient se trouver dans la terre glaise et remonter à la surface, faisant ainsi des bosses qui feraient dévier les bourles de leur trajectoire. Ensuite, on y répand de la sciure et l'on balaye. Les réparations se faisaient avec un mélange de terre et du suin de mouton.

A chaque bout de piste, un petit fossé est creusé, c'est le "noyon" appelé plus communément "l'cul". Quand la bourle y tombe, elle est nulle. Deux mètres en avant, c'est le but ou " l'étaque" : une petite rondelle de cuivre incrustée dans le sol et percée en son centre.

Le jeu se joue à 2 équipes, tirées à pile ou face. Dans chaque équipe, un commandant dirige les opérations car il ne s'agit pas de lancer la bourle à tort et à travers, c'est d'abord aux  "pointeux"' de jouer, ce sont eux qui visent l'étaque. Il faut s'en approcher le plus près possible. Une autre partie de l'équipe, qui commence le jeu, doit faire rouler ses bourles de telle façon que, s'arrêtant au milieu de la piste, elles fassent barrage à l'équipe adverse. Les "frappeux", sur l'ordre du commandant, visent l'une ou l'autre bourle pour la frapper avec vigueur et la faire glisser le plus près possible de 1'étaque ou dégager le chemin des bourles suivantes jouées par les "placeux".

Pour s'approcher du but, l'équipe adverse doit faire louvoyer ses bourles entre celles de la première équipe. C'est là que "le côté fort" et l'habileté du commandant ont beaucoup d'importance. Il donne des ordres: "fort au mur" ou "fort au jour" selon qu'il décide que la bourle, pour parvenir à son but, doit être lancée avec son côté fort vers le mur ou vers la fenêtre. Personne ne peut contester la décision du commandant, comme dans un navire il est seul maître à bord. Soudain, retentit un cri de victoire : "all est Jo ! " L'une des bourles est en plein sur l'étaque et donne la victoire à son équipe.

Si un point est litigeux, on plante la pointe d'un immense compas dans le trou du milieu de l'étaque et l'on mesure les distances séparant les bourles du but.


Tiré de "Les cafés roncquois d"hier et d'aujourd'hui"
(publication du Club roncquois d'histoire locale)

   

Les bourles près de l'étaque et le compas

Les bourleux de Saint Paul devant leur siège
le café Bossut à Hem

 

Extraits de "Souvenirs d'un ancien petit garçon" Georges MOTTE-DELATTRE (1895)
(Un dimanche au château de Lannoy)

...
A la Bourloire commencent les affaires sérieuses, et les responsabilités de chacun. Ces messieurs "tombent" la veste (je veux dire les Oncle Léon, Louis et Edmond la redingote, Père et l'oncle Edouard la jaquette - la jaquette fait "plus jeune" - et apparaissent tous en gilet blanc et pantalon à damier).

Louis et Edouard organisent les camps adverses dont on désignera le chef, et dont l'effectif se constitue d'après les désignations alternées. C'est un choix savant, où le chef doit procéder à un certain dosage de "pointeux" et de "tapeux", car les nécessités forceront, suivant les dispositions variées du jeu, à intervenir parfois en finesse, parfois en force.

Et, sur une piste relevée sur ses deux côtés et qui se développe sur une vingtaine de mètres, les parties se déroulent pleines d'imprévu - le jeu se joue à boules aplaties - la première partie se joue par boules alternées, boule rouge, boule verte. Le camp qui a placé la boule gagnante mène ensuite le jeu (c'est-à-dire dispose toutes ses boules) et garde le commandement aussi longtemps qu'une boule adverse mieux placée ne le lui aura pas ravi.

Et c'est tout un art pour le chef de camp que de disposer son jeu. Chacun a deux boules à jouer. Le Chef de camp jouera la première pour "placer" (c'est-à-dire l'acheminer le plus près possible du "Mai" ou touffe de feuillage situant le but. Il gardera l'autre boule en réserve pour boucher les éventuelles lacunes et améliorer la couverture de son jeu. La tactique consiste à avoir le plus rapidement possible une ou deux boules bien placées, et à couvrir celles-ci par d'autres placées en chicane, et destinées à "casser" le parcours des adversaires.

Toutes les boules étant ainsi jouées par le camp ayant la priorité, le chef de camp adverse examine les dispositions du champ de bataille dans lequel il aura à évoluer. Il en observe les forces et les faiblesses. Il voit si les approches du "Mai" sont bien gardées, et s'il ne peut pas, par un savant "coup de quat'rives" contourner les défenses et insinuer la boule gagnante. Ou, si cela ne lui paraît pas possible, si les positions adverses sont trop denses et trop compactes, il fera intervenir un "tapeux" pour aérer le jeu. Heureux alors est-il si une boule nerveuse et bien centrée permet de déblayer quelques obstacles gênants et de découvrir la boule adverse la mieux placée. Une seconde intervention permettra, peut-être, de déplacer celle-ci et de la faire glisser au-delà du Mai. Alors ce sont des trépignements ... "A boule c'est jo" - ce qui veut dire qu'il suffit de venir "mourir" contre la dite boule adverse pour lui enlever la place. Ces dames, assises sous les tonnelles qui bordent la bourloire, en retiennent leur respiration et en interrompent leurs causettes. Alors, intervient le chef de camp assaillant qui, tout bien pesé, tout bien examiné, lance sa boule suivant un parcours savamment étudié, et la suit à petits pas pour l'influencer du regard et la conduire comme par la main, là où elle doit en s'affaissant procurer la victoire à son camp.

Par ces passes successives d'attaque et de défense, l'intérêt subsiste et rebondit, et ce jeu passionnant retient grands et petits jusqu'à l'heure où la maîtresse de maison, responsable du souper, arrive à reprendre en main son effectif de convives.

...


Quelques liens Internet :

- site La Bourle (Wikipedia)

- site La bourle ou l'art d'approcher l'étaque (Lille Métropole)

- site La Bourle ou Boules Flamandes (Jeux Picards)

- site Fédération des Sociétés de Bourles du Nord

- site Fédération des Sociétés de Bourles de Wattrelos

- site de l'Association saint Louis à Leers

- Reportage Vidéo Grand Lille TV

- Images Google

 

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